Lors des mes recherches, je me suis intéressé aux différents dignitaires nazis au travers de biographies afin d’en apprendre plus sur leurs vies, leurs intimités. Et à travers mes lectures, certains noms sont apparus, que je ne connaissais pas. Eda Goering, Rolf Mengele, Wolf Rüdiger Hess, Gudrun Himmler. Ce sont les enfants de ces cadres du nazisme, qui ont tous été au premier plan de la grande machine nazie. Mais qu’étaient devenus ces personnes?
Comment avaient-elles pu grandir dans l’Allemagne d’après-guerre avec un tel nom? Que pensaient-il des agissements de leurs parents? Je me suis donc acheté ce livre, que je recommande aux plus curieux: « Enfants de nazis », de Tania Crasnianski, chez Grasset. Un bouquin passionnant qui retrace la vie des enfants des plus grands dignitaires nazis. J’ai également lu pas mal d’articles et j’ai fouillé sur internet… Pour découvrir qu’un de ces enfants ne vit qu’à trois kilomètres de chez moi. Imaginez le frisson de voir apparaître devant moi, après des heures de recherche minutieuses en langue allemande, une adresse. Et pas n’importe laquelle…
C’est bien connu, l’admiration pour un père peut n’avoir aucune limite. Certaines personnes en fin de vie vont crier « papa! » avant de s´éteindre définitivement. Cette admiration peut parfois occulter la vie de son géniteur. Il est bien difficile de séparer un père aimant d’un tueur en série, d’un dictateur, ou d’un mafieux.
Gudrun est de ces gens pour qui, l’amour de son père sera plus fort que tout. Sur les rares photos que l’on peut trouver d’elle, la première impression est de regarder une mamie ordinaire, vivant une existence de retraitée paisible. Il n’en est rien.
Elle s’appelle Gudrun Burwitz. Burwitz, c’est le nom de son mari, journaliste d’extrême droite, ancien membre du NPD, le Nationaldemokratische Partei Deutschlands, parti néo-nazi né dans les années 60, regroupant des nostalgiques du IIIème Reich. Son nom de jeune fille c’est Himmler. Oui, Heinrich Himmler, le maître la SS, cet état dans l’état nazi dont le pouvoir était considérable: Direction des camps de concentration, répression politique et tortures par la Gestapo, organisation et mise en place de l’holocaust, et j’en passe.
Heinrich Himmler était le numéro deux du Reich, après Hitler. Sa fille naquit en 1929. Elle était la parfaite petit aryenne. Blonde, comme sa mère Margarete Siegroth, visage angélique, elle pose sur une photo lorsqu’elle accompagne son père au camp de Dachau, pour une visite d’inspection. Elle parle de moments « merveilleux » passés au camp, avec une grande curiosité pour le potager. On peut la pardonner, difficile de se rendre compte de l’horreur lorsqu’on est si jeune.
Mais difficile de pardonner Gudrun pour la suite! Après la fin de la guerre et la mort de son père, elle s’est battue pour restaurer la « vérité » sur ce dernier. Elle refuse d’ailleurs de croire qu’il s’est suicidé le 23 mai 1945. Pour elle, impossible que son géniteur se soit suicidé. C’est un assassinat de la part des britanniques pour le faire taire, pour qu’il ne puisse pas parler des négociations secrètes qui avaient eu lieu entre le dignitaire et le gouvernement anglais. La preuve qu’elle avance? Un schéma de la dentition de son père du Royal Dental Museum d’Aldershot en Grande Bretagne qui démontrait qu’il n’existait absolument aucune trace d’une quelconque cavité dans une des dents de son père qui pouvait abriter une capsule de cyanure.
Elle n’eut cesse de défendre l’oeuvre de son père. Pour elle, il n’était absolument pas le monstre que les vainqueurs ont essayé de créer. C’était un homme de conviction et d’action. Mais l’action de Gudrun ne s’arrête pas à la défense de la mémoire d’Heinrich Himmler. Participation à des rallyes nazis en Autriche, réunion de nostalgiques en Forêt-Noire, cofondatrice d’un mouvement ressemblant fortement aux jeunesses hitlériennes, un emploi du temps bien chargé.
Et ce n’est pas tout: jusqu’à aujourd’hui, Gudrun Burwitz a passé sa vie à aider les derniers dignitaires nazis encore en vie à échapper aux tribunaux, par le biais de l’obscure organisation de soutien baptisée « Stille Hilfe » (aide silencieuse) dont elle est une figure incontournable.
Pour rappel, la Stille Hilfe est une organisation crée officieusement en 1951 dans le but d’extrader les nazis vers l’amérique du sud (la fameuse route des rats). La Stille Hilfe collecte également des fonds pour soutenir les mouvements d’extrême droite. J’y reviendrai prochainement dans un article.
Dans les combats les plus récents de Gudrun on peut citer:
- Aider Samuel Kuntz, 89 ans, ancien gardien du camp d’ex-termination de Belzec accusé d’avoir participé à l’assassinat de 433.000 Juifs. Il vient de mourir dans son lit.
- Empêcher l’ extradition de Klaas Carel Faber. Né aux Pays-Bas, il avait été condamné à mort en 1947 par un tribunal hollandais pour le meurtre de vingt-deux Juifs et résistants pendant la guerre. Faber meurt le 24 mai 2012 d’insuffisance rénale, à Ingolstadt, au nord de Munich, à l’âge de 90 ans.
- Elle a également aidé Anton Malloth, un gardien sadique de camp de concentration, condamné à mort par contumace avant d’avoir trouvé refuge en Allemagne. Cet ancien nazi a été placé dans une maison de retraite à Munich grâce à l’argent de l’organisation. Gudrun Burwitz lui rendait visite chaque semaine avec des fruits et des chocolats.
Gudrun a aujourd’hui 88 ans. Je ne divulguerai pas son adresse, ca n’est pas le but de cet article. Je me suis rendu devant sa maison, avec je l’avoue une bonne dose d’adrénaline et je n’ai même pas osé descendre de ma voiture. Je ne l’ai pas aperçue, et dans le fond, cela n’est pas si grave. Ce qui me terrifie, c’est que si, moi, je sais ou elle habite, quelle activité elle pratique, je me demande pourquoi le gouvernement allemand ne fait rien pour l’empêcher d’agir. Munich et la Bavière sont ils des nids à anciens nazis, qui peuvent profiter de leurs retraites en toute impunité?
Encore beaucoup de choses à vous faire découvrir!
J’aime bien l’angle de cet article ; j’ai entendu parlé très récemment de Gudrun Himmler via un excellent documentaire allemand intitulé « Himmler, der Anständige », anständig (correct) étant l’un des qualificatifs que le Reichsführer SS affectionnait particulièrement, comme son épouse, elle, aimait à le surnommer « mon lansquenet »(sic). La famille Himmler y est décrite durant les années du nazisme et on se pose inévitablement la question de ce qu’il a pu advenir de la descendance. Le documentaire y répond et votre article complète et confirme le destin dans le déni d’une « indécrottable » Gudrun. A noter que la nièce d’Himmler dont j’ai oublié le prénom (mais je vais rechercher) eut une approche du phénomène diamétralement opposée et s’est investie dans un travail historique et de dénonciation des crimes nazis.
La fin de votre « papier » fait frémir et l’on vous imagine in situ cherchant à apercevoir une ombre…bravo !
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Katrin Himmler (née en 1967 à Dinslaken) est une écrivaine et une politologue allemande, petite-fille de Ernst Himmler, le jeune frère de Heinrich Himmler, figure de l’Allemagne nazie et architecte de l’Holocauste. Elle publie en 2007, Die Brüder Himmler: Eine deutsche Familiengeschichte (« Les Frères Himmler, une histoire familiale allemande »).
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Je voudrais en savoir un peu plus sur l’Allemagne nazie et surtout sur les dirigeants et leurs familles et les autres familles merci de votre réponse cordialement
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